Lucas ALLENDE SANTA CRUZ

Lucas Allende Santa Cruz
Archives personnelles

Lucas Fernando est né le 18 octobre 1914 à Maliaño de Camargo (Santander) et le 19 octobre 1919 pour la France et l’Allemagne. Il est le fils de José ALLENDE et de Claudia SANTA CRUZ.

En 1935, à 20 ans, il effectue son service militaire dans le régiment d’artillerie de Vitoria (Álava). Ce service militaire est écourté car le 18 juillet 1936 éclate le soulèvement des généraux rebelles contre le gouvernement légal de la République espagnole en place et va provoquer la guerre civile dans tout le pays.

Lucas s’engage comme soldat à Santander dans le bataillon 101, 4e compagnie du front nord 1936. Puis, à partir d’avril 1937, il intègre le 22e groupe du « Cuerpo de seguridad y asalto  » dans le camp des Républicains, recevant l’aval du syndicat de la UGT. Tout d’abord, il est « Guardia de asalto », puis il accède au grade de Caporal de la ville de Santander, qui tombe aux mains des franquistes le 26 août 1937. Ensuite, Lucas continue le combat en terre asturienne et plus particulièrement à Ribadesella qui va être sous la coupe de Franco le 27 septembre 1937. Lucas doit fuir au plus vite par la mer, seul moyen de ne pas tomber entre les griffes de Franco. Il embarque sur un bateau à Ribadesella et débarque à La Pallice-La Rochelle. Ensuite, ces combattants redescendent en train vers la zone républicaine. C’est à Caspe (Zaragoza), que Lucas poursuit la lutte contre les rebelles, dans ce même cuerpo de seguridad y asalto et dans lequel il obtient le grade de Sergent. Il va participer à de nombreuses batailles dont celle du front de l’Èbre. Mais le 26 janvier 1939 Barcelona tombe et va commencer pour tous ces républicains espagnols, civils et militaires la Retirada vers la frontière française.

Lucas va la franchir par le Perthus le 10 ou 13 février 1939. Puis, il est interné dans divers camps de « concentration » du sud de la France : Argelès-sur-Mer, Gurs et celui de Judes à Septfonds. Il quitte Septfonds le 25 novembre 1939 pour aller travailler comme manœuvre, puis mouleur, dans une entreprise française Les Forges et Aciéries du Saut-du-Tarn à Saint-Juéry (Tarn). Il y reste jusqu’au 6 juillet 1940. Après son départ, il est interné dans le camp de la Viscose à Albi (Tarn) jusqu’au 5 novembre 1940. Puis, c’est le retour au camp d’Argelès-sur-Mer en tant que mouleur. Il y reste jusqu’au 13 juin 1941.

Le 14 juin 1941, Lucas, comme nombreux de ces combattants républicains espagnols, est livré aux Allemands par le gouvernement de Vichy pour aller travailler à la construction de la base sous-marine de Brest en tant que travailleurs forcés que les nazis appellent « Rotspanier » (Espagnols rouges). Tout d’abord, il occupe un emploi de monteur à la base à l’entreprise allemande Keller (Organisation TODT). Il y est d’ailleurs victime d’un accident de travail le 20 septembre 1941. Il est cantonné dans le camp de Sainte-Anne-du-Portzic, puis au camp de Saint-Pierre. Puis, il quitte l’entreprise Keller en novembre 1941 et est embauché comme menuisier à la firme NSKK (Corps de transport national-socialiste) au staffel 36 au fort Castel et aux staffels 3 et 8 au fort de Kéranroux.

Parallèlement à son activité au NSKK, Lucas (son nom de résistant) appartient au groupe de Résistance FTP-UNE de Brest du 1er janvier 1943 au 28 mars 1944. Son rôle est de distribuer des tracts, des journaux et de récolter de l’argent pour les camarades réfugiés se trouvant dans la clandestinité. Il a aussi été, en octobre et novembre 1941, à l’origine de plusieurs sabotages à la base sous-marine et au fort de Kéranroux. Le responsable du groupe de résistants espagnols de Brest « Los Deportistas » qui comporte une soixantaine de personnes, est Antonio García Martín (nom de résistant : Antonio Moreno) arrivé à Brest le 1er novembre 1943, venant de l’Yonne.

Mais le réseau de résistants espagnols de Brest tombe le 28 mars 1944, suite à une dénonciation. Onze résistants sont arrêtés par la Gestapo à Brest. Leur chef, Antonio Moreno, sera fusillé le 21 avril 1944 à Poulguen en Penmarc’h. Quant à Lucas, il est incarcéré à la prison de Pontaniou de Brest du 28 mars 1944 au 30 avril 1944, tout comme 9 de ses camarades espagnols. Puis, Lucas et ses compagnons de lutte sont transférés le 1er mai 1944 à la prison Jacques Cartier de Rennes où ils sont interrogés. Ils y restent jusqu’au 25 mai 1944. Le 26 mai 1944, ils sont internés dans le camp de transit de Royallieu à Compiègne. Lucas reçoit le numéro d’interné 37900. Ils quittent le camp le 18 juin 1944, intégrant le convoi de wagons à bestiaux I.229 qui prend la direction du camp de concentration nazi de Dachau où ils arrivent le 20 juin 1944. Lucas est le matricule 74133.

Le camp de Dachau est libéré le 29 avril 1945 par l’armée américaine, mais Lucas ne revient en France que le 28 ou le 30 mai 1945, car une épidémie de typhus sévit dans le camp. Puis, à la maladie s’ajoute aussi le fait que Franco a déchu de leur nationalité ces « Espagnols rouges » et donc, ils ne peuvent plus retourner dans leur pays. Ils demandent à Edmond Michelet (écrivain puis ministre), lui-même déporté dans ce camp de Dachau, si la France ne peut pas les accueillir. « C’est ainsi que nous ramenâmes, six semaines plus tard, …, trois cents Espagnols rouges et trois cents Polonais blancs ». Lucas est pris en charge par le centre de rapatriement de Mulhouse. Ensuite, il se rend à l’hôtel Lutetia à Paris pour enregistrer son retour, pour des visites médicales, etc.

Lucas revient à Brest en juin 1945, puis part en convalescence au Bourget et à Gennevilliers avant de venir à Tonquédec dans les Côtes-du-Nord en mars 1946 et, où il trouve un emploi de menuisier. Fin novembre 1946, il est embauché comme ébéniste aux Ateliers Le Goff à Plouaret. C’est là qu’il va rencontrer sa future épouse Suzanne Pastol. Ils se marient en décembre 1947. De leur union vont naître Jean-Louis, Claudine et Bruno.

AD29. 63W32. Carte d'dentité de travailleur industriel.
AD29. 63W32. Carte d’dentité de travailleur industriel.

En 1954, Lucas ou Fernando, pour nous, sa famille, va obtenir la nationalité française et, ainsi pouvoir voir sa mère, ses frères et sœurs en Espagne franquiste en 1968.

Fernando recevra de la République française onze décorations pour son implication dans la Résistance dont les principales sont : Chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire, la Médaille militaire, la Croix de guerre 1939-1945 avec une palme en bronze, la Croix de combattant volontaire de la Résistance, la Médaille de la déportation et de l’internement pour faits de Résistance.

Les onze décorations de Lucas ALLENDE SANTA CRUZ. Photo de Lucas ALLENDE SANTA CRUZ.
Les onze décorations de Lucas ALLENDE SANTA CRUZ. Photo de Lucas ALLENDE SANTA CRUZ

Fernando est décédé à Guingamp le 28 février 1995. Son acte de décès comporte la mention « Mort pour la France ».

Claudine Allende Santa Cruz
Brest, le 3 mars 2022

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