Le parcours de Paco RABANNE et de la famille RABANEDA CUERVO dans le Finistère à partir du 1er février 1939
PACO RABANNE, de son vrai nom Francisco Rabaneda Cuervo, est né le 18/02/1934 à Pasaia (Pasajes en castillan) dans la province de Guipúzcoa au Pays basque espagnol et décédé le 03/02/2023 à Portsall (Finistère). Il est le fils de Francisco Rabaneda Postigo et de María Luisa Cuervo Fernández.
Francisco Rabaneda Postigo, son père, est né le 21/08/1903 à Mollina dans la province de Málaga. Engagé volontaire, il a participé à partir du 05/02/1921 à la guerre du Rif espagnol au Maroc (1921/1927) aux côtés de Franco, Millán Astray, Miguel Primo de Rivera … Pétain… contre les troupes d’AbdelKrim. Il accède au grade de Caporal dans le Génie, puis à celui de Sergent.
En 1927, il est nommé à San Sebastián (Guipúzcoa) et, en 1929, obtient le diplôme d’instructeur de gymnastique. Il y rencontre María Luisa Cuervo Fernández, originaire de Santander, qui est première main chez le couturier Cristóbal Balenciaga à San Sebastián.
Francisco et María Luisa, née le 11/08/1908 à Santander, se marient le 22/08/1929 dans le pays basque espagnol et sont domiciliés à Pasaia (Pasajes en castillan) dans le quartier de Trintxerpe.
Quatre enfants vont naître de cette union :
– Olga Rabaneda Cuervo, «Rabanne Cuervo» sur son acte de décès, née à Donostia (San Sebastián en castillan) le 16/11/1931 et décédée le 22/03/2017 à Semur-en-Auxois (Côte-d’Or).
– Pacífico Rabaneda Cuervo né le 06/12/1933 dans le pays basque espagnol.
– Francisco Rabaneda Cuervo né le 18/02/1934 à Pasaia et décédé le 03/02/2023 à Portsall (Finistère).
– Dulce Rabaneda Cuervo née le 22/08/1935 à San Sebastián et décédée le 20/05/2022 à Antibes (Alpes-Maritimes).
– Francisco RABANEDA POSTIGO et la Guerre d’Espagne 1936/1939.
Quand la Guerre d’Espagne 1936/1939 débute par le putsch des militaires de Franco et de ses acolytes le 18/07/1936 contre la République légalement installée, Francisco, le père de Paco s’engage pour défendre la cause républicaine à Pasaia dans «las Milicias Antifascistas Obreras y Campesinas (M A O C)» ou Milices Antifascistes Ouvrières et Paysannes de la province de Guipúzcoa.
En automne 1936, il accède au grade de Sergent puis d’Adjudant et très vite devient Capitaine puis Commandant du premier bataillon des M A O C Larrañaga de l’Armée d’Euskadi, en lien avec le Partido Comunista de España (P C E).
Il participe aux combats contre les militaires insurgés de Franco dans le Pays Basque ainsi qu’en Asturias en automne-hiver 1936/1937. Il devient Commandant de bataillon jusqu’en avril 1937, servant plus tard comme Chef de la 1re Brigade des Divisions du XIVe Corps de l’Armée du Nord.
Le 12 septembre 1936, il demande à être réintégré dans l’Armée des Volontaires de la République et donc dans le Génie où il accède au grade de Lieutenant en juin 1937.
Après la chute de Bilbao le 19 juin 1937, les combats se déplacent vers l’ouest du «Frente Norte» vers la province de Santander et en particulier dans la région de Santoña. Le 24 août 1937 est signé en ce lieu le «Pacto de Santoña» par les dirigeants politiques du P N V (Partido Nacionalista Vasco) et les commandants des forces italiennes et alliées de Franco. L’évacuation par mer des chefs militaires basques est prévue dans ce «Pacto», mais le général Franco dénonce cet accord et les fait mettre en prison au Penal de El Dueso. Parmi eux, se trouve Francisco RABANEDA POSTIGO (Communiste) qui va être condamné à mort et fusillé par les franquistes le 15/10/1937 à 6 heures du matin sur la plage de Berria.
Francisco Rabaneda Postigo repose au cimetière de Santoña (province de Santander).
Le grade de Capitaine dans le Génie lui est attribué à titre posthume.
– Parcours de Paco RABANNE et de la famille RABANEDA CUERVO en Bretagne à partir du 1 février 1939.
Après la chute de Irún le 05/09/1936 et de San Sebastián le 13/09/1936, les cinq membres de la famille Rabaneda Cuervo et la grand-mère María Fernández Sierra, née le 12/04/1868 à Santander et veuve de Antonio Cuervo, vont certainement quitter Pasaia et le Pays Basque espagnol sous les bombes. Ils regagnent possiblement la région de Santander où ils sont inscrits sur un registre, à la date du 20/10/1936, afin d’être évacués « par mer » et ainsi tenter de gagner la région de Cataluña toujours républicaine en 1937. Ont-ils embarqué sur un bateau depuis Santander et débarqué dans un port français, puis continué leur chemin vers Cataluña ou ont-ils réussi à se rendre dans la région de Barcelona par un autre moyen de transport ? Il n’a pas été trouvé de justificatif qui puisse nous le préciser.
Mais, lors du témoignage que Paco Rabanne a accordé à trois membres de MERE 29 le 5 novembre 2012 dans sa maison de Portsall, il précisait «À ce moment-là est passé un paysan avec sa petite camionnette. Il a appelé ma mère: ″María Luisa, venez vite, ils arrivent !”. Il nous a mis au-dessous des légumes et des sacs, …. et il nous a amenés vers Barcelone.»
Puis, sur un document trouvé aux AD 29, il est noté qu’ils avaient élu domicile dans la ville de Gerona ou dans la province du même nom en Cataluña, sans aucune date, mais certainement peu de temps avant que ne tombe la capitale catalane.
Par la suite, l’avancée des troupes franquistes et la chute de Barcelona le 26/01/1939 vont conduire tous ces républicains espagnols à passer la frontière pyrénéenne dans cette grande débandade connue sous le nom de RETIRADA.
Les membres de la famille Rabaneda Cuervo vont faire partie de cette foule de 450 000 à 500 000 désespérés qui vont partir en exil vers un lieu inconnu. Le train qui quitte le département des Pyrénées-Orientales va les conduire en Bretagne.
C’est tout d’abord au Conquet (29) à Beauséjour, à la colonie de vacances de la ville de Brest qu’ils sont hébergés le 01/02/1939 ; María Luisa va être hospitalisée à Brest du 24/03/1939 au 31/03/1939.
Puis, le 12/05/1939 ils sont transférés dans le centre de réfugiés La Salette à Saint-Pierre-Quilbignon (29) près de Brest, chez Mr Étienne Laroque qui est restaurateur.
Ensuite, en octobre 1939, venant de chez Mr Laroque ils vont être logés à la colonie de la Ville de Morlaix à Plougasnou (29), tout comme de nombreux réfugiés espagnols.
Ils vont y rester un certain nombre de mois mais quittent ce lieu grâce certainement à l’intervention de François Tanguy-Prigent député-maire de Saint-Jean-du-Doigt (29), commune proche de Plougasnou, que María Luisa, la mère de Paco Rabanne, connaissait.
Toute la famille s’installe à Ploujean (29) près de Morlaix au lieu-dit Kerscoff pendant la durée de la Seconde Guerre mondiale comme l’indique le recensement de 1946 de la ville de Ploujean où l’on s’aperçoit que la grand-mère María Fernández Sierra, fille de Francisco Fernández et de Juliana Sierra, n’est pas répertoriée. Peut-être avait-elle été admise dans un hospice à Morlaix à cette date ?
Son acte de décès trouvé à la Mairie de Morlaix le 29/12/2023 précise que María Fernández Sierra, veuve de Antonio Cuervo, s’est éteinte à 81 ans et 8 mois le 25/12/1949 à 10h45 dans le quartier du Château à Morlaix et donc très loin de sa terre “montañesa” de Santander où repose son époux Antonio.
Après les moments difficiles vécus à Ploujean dans la France occupée, les enfants de María Luisa vont prendre ou reprendre le chemin de l’école tout d’abord à Ploujean (École communale de Troudousten). Puis Paco va connaître le Collège de Morlaix, le Lycée des Sables-d’Olonne et faire des études d’architecture à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris.
La famille Rabaneda Cuervo a probablement quitté la Bretagne en 1950/1951.
Par la suite Francisco Rabaneda Cuervo, qui avait choisi le pseudonyme de Paco Rabanne, va être connu et reconnu dans le monde entier comme un grand couturier, un parfumeur de renom et également célèbre pour ses déclarations excentriques.
Article du Télégramme du 4 février 2023 suite au décès de Paco RABANNE survenu le 3 février 2023 à Portsall (29) :
Sources :
– Libro de Xabier Portugal Arteaga : «Pasaia 1931-1939. La memoria de los vencidos».
– PARES. Centro Documental de la Memoria Histórica (CDMH).
– Archivos de Euskadi.
– A D 29 1 M 306 : Extraits des listes des arrivées de réfugiés espagnols en 1939 au Conquet, Saint-Pierre-Quilbignon et Plougasnou.
– A D 29 238 W 15 : Extrait du recensement de la ville de Ploujean (Finistère) de 1946.
– Mairie de Semur-en Auxois (Côte-d’Or) : Registre de l’État civil.
– Mairie d’Antibes (Alpes-Maritimes) : Registre de l’État civil.
– Mairie de Morlaix (Finistère) : Registre de l’État civil.
Claudine Allende Santa Cruz
Le 15 février 2023